Quelle que soit la pratique d’équitation que l’on ait, la recherche, la préservation et l’amélioration de la flexibilité forment l’objet de recherches constantes et toujours perfectibles. Y est associée la décontraction, encore que l’expression prête à confusion (au même titre que de nombreuses expressions propres à l’équitation d’ailleurs); en effet, à «décontraction» se superpose souvent la nonchalance… alors qu’il s’agit d’aucune contraction musculaire «inutile» au mouvement recherché.

La flexibilité naît de l’absence de contractions (résistances volontaires ou non) contradictoires, opposées au mouvement considéré. De là peut-être, l’utilisation de l’expression “décontraction” …
Spontanément, en posant la question à des cavaliers sur leurs sensations liées à la flexibilité, viennent les mots suivants :

  • élasticité

  • souplesse

  • fluidité

  • absence de résistances

  • facilité

  • homogénéité

  • liant

  • souplesse du dos

La liste n’est pas exhaustive.

D’un point de vue littéral, la souplesse est associée à la flexibilité, que l’on trouve d’ailleurs dans la définition de l’encyclopédie Wikipédia sous cette forme :

…la flexibilité est la latitude de mouvement d’une articulation, qui peut être augmentée par des étirements (souplesse)…

Ce qui, contrairement à l’idée générale des cavaliers, n’est pas exclusivement associée au dos du cheval ! En effet, pour bon nombre de cavaliers, cette flexibilité est caractérisée par le fonctionnement souple et élastique du dos qui transmet la propulsion de l’arrière-main vers l’avant-main. Qu’en est-il alors des membres ainsi que de la tête et de l’encolure, bref, de toutes les autres parties du corps du cheval ? Je pense qu’à la flexibilité doit être associée la notion d’homogénéité, c’est à dire que sous les directives de son cavalier, le cheval puisse employer toutes ses articulations avec souplesse et sans oppositions, ni plus, ni moins.

S’ouvre ici une parenthèse concernant les mobilisations et les étirements qui permettent de renseigner le schéma corporel du cheval d’une part, et le cavalier sur les éventuelles “limitations d’amplitudes articulaires” d’autre part.

Pour ma part et sous un aspect bauchériste, il est logique que soient dissociées les différentes parties du corps du cheval en sorte d’isoler chaque “foyer de résistances” (manque d’amplitude voire pas d’amplitude du tout), c’est à dire de pratiquer des actions locales pour “détruire” chaque résistance (je ne reviens pas sur l’état d’esprit bauchériste quant à la destruction de résistances qui n’ont rien à voir avec un rapport de force!).

La flexibilité de l’encolure :

Évidemment, d’un point de vue bauchériste, le sujet amène spontanément aux flexions ! Soit. Mais on risque de ne pas aller « au bout des choses » si l’on s’en tient exclusivement « à la méthode » dont la majorité des cavaliers appliquera en priorité l’élévation maximale de la tête et de l’encolure. Ce qui n’a rien “d’anormal” si ces flexions ont pour but de familiariser le cheval avec la main d’une part, et de lui faire adopter des postures dans le but d’une “reconstruction posturale” en vue de se rééquilibrer sous le poids de son cavalier d’autre part. Hors, dans cette posture, il est bien difficile voire impossible de solliciter le jeu latéral des cervicales basses, alors que cette zone de la colonne cervicale est souvent le foyer de résistances. Cela se traduit par une incurvation « incomplète » de l’encolure, celle-ci donnant l’impression de n’être articulée qu’à la sortie du garrot et dans les cervicales hautes.

S’ouvre ici une nouvelle parenthèse : tant pis pour les utilisateurs scolaires de la méthode dont j’ai fait partie d’ailleurs ; s’il me semble plus important de s’attacher au fond qu’à la forme, c’est donc à la recherche de la souplesse et de la mobilité de toutes les parties du cheval qu’il faille s’attacher. Et concernant l’encolure, on en vient à chercher à ce que toute résistance dans celle-ci ait disparu. Les directives du texte de Faverot de Kerbrech donnent des axes, mais ils ne doivent pas être figés ! À chacun d’emprunter des contre-allées pour peu qu’elles conduisent au même endroit… Ce qui fait sourire quelques interlocuteurs quand dans mes propos j’expose que je ne suis pas bauchériste deuxième manière, mais bauchériste à ma manière ! Seul le fond m’intéresse, la forme est propre à chacun et doit être le fruit de l’expérience et de la recherche des uns et des autres, pour peu qu’elle soit fidèle au courant de pensée !

Donc, contrairement ou plutôt en complément des directives de Faverot de Kerbrech, les flexions seront pratiquées encolure haute, mais aussi encolure basse ! Et ce en sorte d’acquérir une souplesse telle qu’elles permettent d’obtenir une mise en jeu de toutes les cervicales. Pour y parvenir, les flexions vont aller jusqu’à ce que le cheval en vienne à mettre son nez sur son flanc, sans aucune retenue. Cela me conduit à (re)mettre en évidence que quelle que soit la demande faite, il faut obtenir du cheval qu’il «suive la main» et ce dans toutes les directions d’une part, ainsi qu’à la plus faible incitation de la main d’autre part. Avec toutefois une limite qui consiste à ne pas prendre le risque d’assouplir « à outrance » cette partie au détriment des autres ! Les flexions d’encolure, si elles sont utiles, ne sont pas une fin en soi… Pratiquées abusivement, c’est prendre le risque de «dissocier» l’encolure du corps du cheval, ce qui n’est absolument pas l’objectif ! Sans oublier, bien sûr, que le cheval “fin et léger” à la main, doit l’être aussi aux jambes!

Pour conclure sur la flexibilité latérale de l’encolure, il reste à aborder ce qui se passe encolure haute. Dans cette position, les cervicales basses n’ont que peu ou pas de jeu latéralement, voire elles s’apparentent à un pivot sur lequel s’articule la partie haute de l’encolure. Dons à proscrire l’oscillation de la base de l’encolure vers la droite ou la gauche selon la flexion demandée. Il est intéressant de noter que les flexions abordées ainsi permettent, quand la tête prend sa place «la plus commode», c’est à dire se rapproche du ramener à l’initiative du cheval, que les parotides ne sont comprimées que l’une après l’autre ce qui, pour un cheval dont les ganaches sont fortement développées, est nettement moins contraignant… Il suffit alors de redresser l’encolure progressivement en sorte que le cheval ne quitte pas son ramener pour qu’il se familiarise à cette position qui peut le mettre dans un inconfort certain en fonction d’une tête plus ou moins bien cravatée ! À noter aussi que la suppression de la flexion “encolure basse” favorise la posture du ramener outré (tout du moins son apprentissage d’un point de vue postural), ce qui a pour conséquence de se mettre en hyper-flexion, donc d’améliorer l’élasticité, la souplesse du ligament supérieur ; d’autre part, le cheval maintenant cette posture de lui-même, si on lui demande de suivre la main vers le haut sans quitter le ramener, se fixe de lui-même dans une attitude «caractéristique» du cheval bauchérisé dans la reconstruction posturale de son avant-main. L’important est que le cheval suive la main sans aucune opposition tout en mâchant son mors. Il y a lieu de mettre en évidence ici que dans ces manipulations, il est bien difficile de savoir si c’est le contact de la main avec la bouche qui lui donne ce liant ou si ce sont les flexions qui donnent la mobilité de la mâchoire… Toujours est-il que de tous les chevaux manipulés ainsi, il se produit systématiquement des manifestations de détente, et l’expression de leur regard traduit bien une forme de “bien-être” encore que ces constats n’engagent que moi… et au fait que je me fie plus volontiers aux sensations que me renvoient mes chevaux…

D’un point de vue longitudinal, l’extension, l’abaissement et l’élévation sont recherchés avec pour but, au final, que le cheval se soutienne encolure haute, rouée, nuque point le plus haut dans la posture du ramener. Le ramener outré étant une posture particulière visant un complément d’assouplissements gymnastiques (donc en mouvement) du dos (entre autre), il faut se rendre compte que cette posture n’a rien, mais alors rien du tout à voir avec la pratique du rollkür ! Cette attitude s’obtient avec cession de mâchoire qui, une fois obtenues, perdurent dans la descente de main : pas de risque et aucun lien avec les chevaux la langue bleuie, en compression sous la main et les jambes du cavalier ! Par cet extrême, il faut rappeler que dans le travail du cheval tel qu’il est abordé ici, la recherche d’annulation de toute résistance (volontaire ou non) est l’idée de fond ; quant à la forme, s’il y a la moindre opposition du cheval, elle s’oriente vers le fait de chercher à ce que le cheval n’emploie que la musculature concernée au mouvement considéré, en supprimant la mise en jeu des muscles antagonistes. Je replace ci dessous la définition issue de Wikipédia (encyclopédie libre) :
En anatomie et myologie, un antagoniste est un muscle ou un groupe de muscles qui s’opposent au mouvement créé par les agonistes. Lorsqu’un muscle travaille, le muscle opposé ne travaille pas, sinon il empêcherait le mouvement de se produire, car les deux muscles se compenseraient. Lors d’un effort musculaire, le muscle agoniste est celui qui se contracte, le muscle antagoniste est celui qui s’étire en réaction à cette contraction. Ainsi, chaque muscle possède son muscle antagoniste.

Par ce principe, connaissant la force musculaire du cheval, il devient aisé de comprendre l’intérêt du bauchérisme à isoler chaque foyer de résistances et de les annuler les unes après les autres par le biais d’actions locales, et ce quitte à le faire cheval à l’arrêt.