Voilà donc les grandes lignes du bauchérisme posées ! Et si tout ne reposait-il pas sur … la communication ? Comment se faire comprendre ? Comment établir ce langage des aides ? Comment obtenir l’adhésion du cheval à notre « projet équestre » sans contraindre ? Le commandant Rousselet, au milieu du 19ème siècle, exposait déjà le principe : « il faut faire aimer le travail au cheval »…

Au-delà de la technique, ne faut-il pas aller chercher entre les lignes, au sens de chercher les moyens, propres à chacun, permettant d’obtenir cette flexibilité, cette reconstruction posturale issue de la meilleure répartition de la charge du cavalier, etc… tout en respectant les caractéristiques propres à la nature du cheval.

S’ouvre alors un champs d’étude extraordinaire, où tout « est à faire » ! À partir du moment où sont « intégrés » les principes techniques, ce qui s’acquiert en peu de temps, il y a tout lieu de « s’émanciper » de la méthode car au fond, il ne s’agit pas de reproduire ce qui a été fait au risque de tomber dans un mauvais plagiat car les écuyers qui ont marqué sous cette forme de travail du cheval demeurent inimitables ! Il ne s’agit donc pas de « figer » ce qui a été fait pour devenir une sorte de gardien de musée. Il n’y a pas d’intérêt à reproduire tous les exercices suggérés dans la méthode par une technique irréprochable, ce qui occulte le fond de leur propre existence ! Concernant ces exercices, il faut s’interroger sur leur origine, et ce qu’ils permettent de développer. Et quand c’est fait, et bien, …, c’est fait ! Au-delà, c’est de l’acharnement… Et il n’est pas interdit de créer ses propres exercices et enchaînements dont le but sera d’améliorer l’équilibre, la flexibilité, etc… Faut-il rappeler qu’est du domaine de l’incohérence le fait de demander au cheval plus que ce qu’il puisse faire !

Il s’agit de construire sa propre relation avec son cheval, selon des principes qui respectent les caractéristiques du cheval qui s’appuient sur sa nature et ce qu’elle lui a donné pour les retrouver monté ; d’où l’intérêt de prendre le temps de réfléchir pour comprendre ce qui fait que le cheval n’arrive pas à trouver tel ou tel équilibre en rapport avec tel ou tel mouvement. Puis s’ouvrent des investigations sans fins car il y a toujours matière à les perfectionner ! En effet, l’équilibre peut toujours s’améliorer, au même titre que la qualité de la mise en main, l’impulsion, la finesse dans l’emploi des aides, etc … Tout est améliorable, ne demande qu’à gagner en finesses et en subtilités dans la relation, dans ces échanges… À chacun d’y trouver son domaine de recherches et d’études inépuisables ! Mais il ne faut pas s’attendre à retrouver des clichés en rapport avec ce que l’on voit sur les rectangles de dressages : les adeptes de cette forme de travail du cheval sont plus souvent orientés vers une sorte de relation intime, passés les prémices concernant l’apprentissage de la technique. D’ailleurs, il n’est pas rare qu’à l’interrogation, le cavalier soit bien souvent dans l’embarras pour expliquer « comment il a demandé et obtenu tel ou tel Air » ; c’est du domaine du ressenti, du tact, du sentiment, d’autres diront du « feeling »… et il devient aisé de comprendre la réflexion critique de certains, reprochant de ne pas avoir eu « le truc qui marche »… à chacun son chemin ! De même, non pas que je condamne les études scientifiques, car elles nous éclairent sur bien des points, mais si elles ne sont pas associées à une pratique assidue, ces études alimentent bien souvent des discours interminables en oubliant que c’est à cheval qu’elles doivent prendre du sens. Combien de fois ai-je vu des « érudits » qui, si je ne m’étais arrêté qu’à leurs discours, devaient être assurément des cavaliers « hors norme » ! Et quelle déception, mis en situation, que de voir des évolutions à cheval « non-regardables », en contradiction totale des discours précédents…
Au risque de répéter ce qui a été exposé plus haut, on revient au fait que sont indissociables le savoir ET le savoir-faire ! La recherche de l’équilibre demeure un point clef, dont découle la pureté des allures, la flexibilité, l’activité, etc… Le cheval ayant accepté de se livrer à son cavalier, le constat suivant est particulièrement révélateur : le cavalier place son cheval dans une attitude particulière, y associant une « quantité d’impulsion » bien précise ; ne se produit alors que le mouvement correspondant à l’équilibre obtenu. Et je rajouterai, c’est tout ! Pour que ce mouvement puisse se faire, l’équilibre ne doit pas être perturbé, et ce tant par le cheval soumis à diverses contraintes propres à sa nature que par le cavalier devant cesser d’agir pour laisser le cheval libre d’agir selon ses disponibilités. Le cavalier doit se contenter « d’aller avec » sans gêner, ce qui est la plupart du temps la cause première d’un éventuel désordre ! Mais avant que le cheval puisse maintenir une longueur interminable de pas de côtés par exemple (si tant est qu’il y ait un sens à tracer une longueur interminable de pas de côtés…), il faut lui laisser le temps de développer sa musculature de façon à ce qu’il puisse simplement faire ce qui lui est demandé !
Simple question de bon sens, et pourtant, c’est bien par là que commencent bon nombre de situations « conflictuelles »…

Alors, la « continuité » du bauchérisme, ne serait-ce pas simplement la prise en compte de principes, et non l’application « à la lettre » d’une méthode, puisque la communication demeure la priorité pour peu qu’elle ne soit pas … unilatérale ! L’échange entre le cheval et son cavalier n’a pas de fin, ni de modèle, mais doit être pris en compte au titre d’une relation, avec toutes les fluctuations que cela implique. Peu importe les moyens employés pour peu qu’ils respectent les principes. Se limiter dans l’application et la maîtrise des techniques n’est pas suffisant. Il manque l’essentiel : l’emploi de la technique se trouve effacée, transparente, écrasée par le tact, le sentiment, ce qui fait passer d’une évolution froide, mécanique, à des expressions vivantes et artistiques où la pureté des allures priment au même titre que la sensation de facilité, d’aisance. Le cheval a retrouvé, en charge de son cavalier, la grâce dont il fait preuve en liberté, son cavalier s’en trouve effacé par la discrétion avec laquelle il se fait comprendre. Le cheval s’est « reconstruit » dans son avant-main, son encolure se roue et ses allures se relèvent : il exprime « tout le brillant » dont la nature l’a doté !

Tout compte fait, ne peut-on dire que l’équitation, ça ne devrait être que ça ! Le cheval, au final de sa « formation », s’est affranchi des contraintes physiques et morales dues au poids de son cavalier et des aides employées, et peut de nouveau exprimer tout ce qui nous émeut lorsqu’il évolue en totale liberté…